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Carnets Vanteaux : Fantasme et nostalgie

Carnets Vanteaux : Fantasme et nostalgie

22 mars 2021 - par Faustine Vidrequin 
 - © Pixabay - Rollstein
© Pixabay - Rollstein

Consigne : La Joconde et moi

Elle avait des yeux qu’on ne voit qu’une fois dans sa vie. Non pas parce qu’ils étaient bleus, ah non, mais parce qu’ils étaient vivants.
Quand pour la première fois nos regards se sont croisés, j’ai vu cette flamme qui n’a jamais cessé de danser. J’ai vu ses grosses larmes qui n’avaient pas encore coulé. J’ai vu ses égratignures, son passé, ses batailles. Je l’ai vue lever les armes, mais aussi les reposer. Dans ses yeux, je contemplais son âme.

Elle avait les yeux brillants, envoûtants même. Quand elle me regardait moi, j’avais l’impression d’être de nouveau vivant, éveillé pour la première fois depuis longtemps. J’avais l’impression d’être enfin dans le présent, pile à l’endroit où je devais être. Quand elle me regardait moi, j’avais l’impression d’être à ma place. Ses yeux à elle faisaient cet effet-là.
Des yeux comme ça, je vous le dis, ça ne s’oublie pas.
Parfois, quand elle était allongée sur le canapé, je sentais son regard me suivre dans tous mes mouvements. C’est un peu comme lorsque l’on regarde la Joconde, où que l’on aille, son regard vous suit. Ses yeux à elle, c’était un peu ma Joconde à moi.
Ces yeux-là, je vous le répète, ils s’impriment en vous, ils ne vous lâchent jamais, parce qu’à eux seuls, ils incarnent le monde, l’amour, la joie. Ils représentaient tout ce qui résonnait en moi. Quand le docteur a annoncé qu’elle n’ouvrirait plus jamais les yeux, j’ai eu un mouvement de recul. Peut-être même deux. Je dois vous l’avouer, j’ai eu envie de tout abandonner. C’était son reflet à elle qui me faisait avancer. Je ne savais même pas si j’allais de nouveau être capable de bouger. J’étais prêt à me sacrifier. Alors qu’ils étaient toujours là, dans ma mémoire, ces yeux-là.

Aujourd’hui, ils sont devenus mes yeux à moi, dans cette case de ma mémoire qui recueille tout ce que je dois protéger afin qu’ils ne s’effacent jamais. Aujourd’hui, c’est à travers ses yeux à elle que je vois. Même si elle n’est plus là physiquement à mes côtés, son reflet dans mes yeux continue de danser. Maintenant que j’ai compris cela, je vais enfin pouvoir les fermer afin de me réveiller à ses côtés.
Bonne nuit et à jamais.

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