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FRANCOPHONIE - Souvent un espoir, toujours un moyen !

FRANCOPHONIE - Souvent un espoir, toujours un moyen !

Parcours d’un convaincu...

Bucarest, Hanoi, Sarajevo... Marc Capelle égraine les souvenirs d’un francophone formateur convaincu.

13 février 2013 - par Marc Capelle 
Marc Capelle
Ph : Aimablement prêtée par Marc Capelle

Pendant une quinzaine d’années consacrées à la coopération internationale dans le domaine du journalisme et des médias, j’ai cotoyé beaucoup de francophones. Des étudiants, des enseignants, des journalistes, des artistes, des politiques, des autodidactes, des jeunes et des anciens. Pour eux, la francophonie était souvent un espoir.

Bucarest, 1990. Bon nombre de mes étudiants et de mes collègues de la faculté de journalisme de Bucarest sont francophones. Beaucoup manquent de pratique, ce qui ne surprend personne après les années de fermeture imposées par le régime Ceausescu. Mais tous affichent un enthousiasme touchant. Parler français, parler avec des Français et plus généralement des francophones, leur donne accès à un nouveau monde. Un monde rêvé, souvent aussi un monde fantasmé. Etre francophone offre la possibilité d’obtenir des bourses d’études et le droit de faire enfin partie d’une large communauté de citoyens en Europe et dans le monde qui ont en partage une langue et des valeurs.

Hanoi, milieu des années 1990. Des étudiants partent effectuer des études à l’Ecole supérieure de journalisme de Lille. D’autres sont recrutés sur place par la télévision nationale qui, avec l’aide de la France, a décidé de créer un journal télévisé quotidien en français. Un quotidien, Le Courrier du Vietnam, voit le jour. Des jeunes vietnamiens deviennent ainsi journalistes parce qu’ils sont francophones. Pour eux c’est un choix professionnel et culturel majeur. En apprenant la pratique et l’éthique de ce métier au contact de confrères occidentaux, ils veulent s’affirmer et montrer qu’ils peuvent contribuer à faire évoluer les choses dans leur propre pays.

Sarajevo, mai 1996. Quelques mois après la fin de la guerre et des trois années de siège imposées à la ville, je dois rencontrer Zoran Udovicic, fondateur de l’Institut Mediaplan. Journaliste, ancien patron de la radio de Bosnie-Herzégovine, éducateur dans l’âme, il veut créer une école de journalisme « à la française ». Il considère que les médias locaux ont, par manque de professionnalisme et par excès de nationalisme, contribué à attiser le conflit et pense que former correctement les futures générations de journalistes est indispensable. A Sarajevo, je découvre aussi le Centre André Malraux, créé par Francis Bueb pendant la guerre. Avec quelques amis il a fait le choix d’apporter aux Sarajéviens assiégés des livres, des films, de la musique, des artistes francophones, pour les aider à respirer, à résister.


Avec l’équipe de l’Institut Médiaplan à Sarajevo. En costume gris : Zoran Udovivicic, fondateur et président de l’Institut.
Ph : Aimablement prêtée par Marc Capelle

Bien sûr, les espoirs sont parfois déçus ou rattrapés par la réalité. Ainsi, vers la fin des années 1990, les jeunes roumains constataient que la maîtrise de l’anglais offrait davantage de débouchés professionnels que le français pour ceux qui espéraient trouver un emploi dans une entreprise étrangère présente sur place. Par ailleurs, la chute considérable des crédits de coopération avait sérieusement réduit les offres d’études ou de stages en France. Au Vietnam, la francophonie ne peut à elle seule réformer le journalisme et les médias, pas plus hier qu’aujourd’hui. Aujourd’hui, à Sarajevo, les activités et projets proposés aux francophones ne gomment évidemment pas les divisions et les difficultés économiques et politiques qui perdurent dans le pays.

Mais si la francophonie est parfois un espoir contrarié, elle est toujours un moyen. C’est en tout cas ce que m’auront appris ces années de montage et de suivi de projets de coopération. Ainsi, j’ai toujours privilégié la langue française lorsqu’il s’agissait d’organiser des programmes de formation destiné à des non-francophones. Dans la plupart des cas les stagiaires préféraient cette formule (qui nécessitait bien sûr de faire appel à un interprète) plutôt que de se voir imposer des formations dispensées en anglais, soit parce qu’ils pratiquaient fort peu la langue de Shakespeare, soit parce qu’en étant confrontés à un formateur francophone ils estimaient – souvent à raison – bénéficier d’une approche, d’une vision, différentes de celle du monde anglo-saxon.

Cette notion prend tout son sens dans les régions ou pays où la concurrence internationale est forte en matière de coopération. Dans les Balkans, par exemple, au cours de la période 1995-2005, la bousculade était rude entre ONGs et gouvernements américains, britanniques, allemands, français, suisses, européens en général, japonais... Chacun voulait imposer ses projets. Dans un tel contexte, faire intervenir des interlocuteurs francophones et surtout proposer un accès à la sphère francophone, facilitait souvent le dialogue. Ainsi, j’ai constaté à maintes reprises qu’offrir des ouvrages en français pour enrichir une bibliothèque universitaire, même dans un pays où les francophones sont peu nombreux, était un geste très apprécié. Très vite les livres en question étaient traduits, au moins partiellement, et permettaient ainsi d’établir des comparaisons avec des textes en anglais. Dans un domaine comme le journalisme, ces nuances ne sont pas indifférentes.

BH Info

Enfin, des initiatives comme BH Info (1) démontrent que les petites graines de francophonie plantées ici et là finissent par fleurir !


(1) BH Info est un site en français dédié à l’actualité de la Bosnie-Herzégovine créé et dirigé par une Bosnienne formée à l’ESJ Lille.

Marc Capelle - De 1990 à 2006, a été successivement conseiller de la faculté de journalisme de Bucarest, directeur des activités internationales de l’Ecole supérieure de journalisme de Lille, attaché audiovisuel régional pour les Balkans puis responsable de la coopération radiophonique au ministère français des Affaires étrangères.

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