francophonie, OIF, Francophonie, Organisation Internationale de la Francophonie, langue française, diplomatie culturelle, littérature, théâtre, festival, diversité culturelle, les francophonies

MENU
Patrick Chamoiseau et Alain Mabanckou nous invitent à exercer notre liberté !

Patrick Chamoiseau et Alain Mabanckou nous invitent à exercer notre liberté !

Liberté de vivre au-delà du regard pesant de la société ; liberté de penser et d’écrire quitte à choquer des « Frères ». Deux textes aussi puissants dans le fond que différents dans la forme !

14 janvier 2012 - par Arnaud Galy 
Patrick Chamoiseau à la Poudrière de Rochefort - © Olivier Longuet - La Poudrière
Patrick Chamoiseau à la Poudrière de Rochefort
© Olivier Longuet - La Poudrière

Une saine excitation s’empare du bienheureux qui prend ce livre en main pour la première fois ! Intuitivement il comprend que le voyage initiatique proposé par les auteurs, Patrick Chamoiseau au clavier et Ianna Andreadis à l’encre, ne sera pas du genre jetable. L’objet même est un présage de plaisir simple et spirituel. Les deux protagonistes du récit, bien que d’une légèreté toute naturelle due à leur condition de papillon de nuit, sont plutôt envahissants ! Leurs discussions, pourtant bien éloignées de celles égrainées au « café du commerce », tiennent davantage du conte philosophique ou de la fable de La Fontaine que du guide du parfait entomologiste ! Car nos papillons dissertent, s’interrogent, se provoquent... ils ont la tchatche ! Ils ne s’attaque à rien moins qu’au sens de la vie ! Bigre ! Le papillon de nuit s’épanouit-il en se laissant griser par la lumière ou peut-il exercer son libre-arbitre et mener une existence digne en refusant le plaisir fugace de se brûler les ailes. Quiconque ferait l’analogie avec l’être humain se tromperait, naturellement, quoique... Au passage, nos deux noctambules confrontent leurs visions et leurs questionnements concernant la connaissance, la vieillesse, la conscience, la beauté, le doute et la certitude...

Le maître et l’élève, le sage et le fringant tel est le duo qui fait le bonheur de tous les écrivains de la Grèce Antique à la Chine confucéenne en passant par les romantiques d’ici ou d’ailleurs. Patrick Chamoiseau s’y est collé et a décollé grâce à ses deux philosophes ailés ! Léger comme la liberté d’être...


Alain Mabanckou
Ph : Hermance Triay / OPALE

La casquette vissée sur le crâne n’est pas l’unique signe de reconnaissance d’Alain Mabanckou. Ses mots « de fer et de velours » le sont tout autant. Le Sanglot de l’Homme Noir est la parfaite traduction de cet oxymore ! Est-il en colère ? Est-il fatigué ? Est-il désillusionné ? Sans doute la réalité est-elle un cocktail à base de tous ces ingrédients. Le fait est qu’il n’impose pas au lecteur ses états d’âme, il tente de l ’éveiller à sa vision, à son analyse basée sur des faits, des gestes et des souvenirs... Au fait, de quoi parle-il ? Simplement de l’attitude prise par certains de ces Frères de couleur qui selon lui ne conduit qu’à un cul de sac. Une attitude qui consiste à invoquer l’histoire de l’esclavage ou la période coloniale pour justifier les errements du continent africain du 21ème siècle et qui marque au fer rouge la langue française comme étant celle de la soumission. Alain Mabanckou juge cette vision trop facile et refuse de la prendre à son compte. Il propose de regarder les troubles du passé avec lucidité, sans occulter les parts d’ombres que d’aucun aimerait recouvrir du voile d’un oubli commode, sans que le rétroviseur ne sclérose les initiatives et les ambitions. Il s’interroge : Le fait d’être noir de peau est-il suffisant pour se sentir Africain d’Afrique porteur du poids du continent, de ses failles et de ses perspectives ? La liberté de ton et de pensée dont use Alain Mabanckou le conduit à affirmer : « … je refuse de me définir par les larmes et le ressentiment ». Ne comptons pas sur lui pour appliquer le théorème... si tous les Hommes Noirs du monde s’unissaient...

Lui, le Congolais qui a posé ses valises aux États-Unis et se sent comme un poisson dans l’eau en France ne veut pas être réduit à sa couleur de peau... l’Homme n’est pas qu’une couleur ! Il est, à priori, libre de façonner sa vie outillé de la palette du peintre...


Le papillon et la lumière - Patrick Chamoiseau (Prix Goncourt pour Texaco en 1992)

éditions Philippe Rey


Le Sanglot de l’Homme Noir - Alain Mabanckou ( Prix Renaudot pour Mémoire de porc-épic en 2006)

Fayard

Partagez cette page sur votre réseau :

Précédents Agora mag