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Un bilan du Forum mondial de la langue française

Un bilan du Forum mondial de la langue française

Xavier North, délégué général à la langue française et aux langues de France

L’heure de dresser le bilan du Forum a sonné. Xavier North, délégué général à la langue française et aux langues de France nous livre ses premières impressions. Entre satisfaction et interrogations.

13 juillet 2012

Quelle est votre lecture globale de l’événement ?

Ce premier Forum mondial de la langue française a été un événement particulièrement important dans l’histoire du mouvement francophone. Organisé en complément des Sommets de chefs d’Etats, il a été un très vaste rassemblement de la société civile. Il faut vraiment saluer sa tenue. On avait pu constater qu’avec le temps, l’Organisation internationale de la francophonie était devenue une organisation politique active mais que la langue française n’était plus au cœur de ses préoccupations. Celle-ci constituait pourtant le lien fondateur mais sans plus... Le Forum doit être vu comme un rééquilibrage et une remise de la langue française au cœur du mouvement. C’est en quelque sorte le retour sur le devant de la scène de la francophonie avec un f minuscule ! C’est donc d’abord un grand succès.

Quels thèmes principaux retirez-vous des débats ?

Xavier North, délégué général à la langue française et aux langues de France
Ph : Arnaud Galy - ZigZag

Deux thèmes ressortent : en premier lieu, la mobilité des personnes dans l’espace francophone. Les nombreux jeunes présents à Québec ont plaidé pour un visa et/ou un passeport francophones mais c’est un sujet complexe, difficile à traiter, car il va de pair avec la question de l’ouverture des frontières qui est éminemment politique ! La facilité de déplacement entre le Nord et le Sud dépasse largement la question de la francophonie... En second lieu, la question d’un autre type de mobilité a animé les débats : celle qui passe par les réseaux sociaux et qui assure une francophonie vivante. Nous touchons là à la notion de déterritorialisation de la langue française et des autres grandes langues du monde. Un phénomène dû aussi aux flux migratoires qui font qu’on retrouve des communautés francophones, sinophones ou arabophones à des milliers de kilomètres de leurs bassins géographiques et linguistiques d’origine. L’espace virtuel qui devient alors le lieu privilégié des échanges mérite d’être étudié et débattu.

Vous semblez surpris par la tournure de certains événements ?

Oui, le Forum de la langue française a pris parfois l’allure d’un forum de la jeunesse francophone, et du coup, l’aspect politique et institutionnel qui était sorti par la porte est bizarrement revenu par la fenêtre. Certes, l’enjeu de départ était de permettre un passage de relais entre les générations... un renouvellement... Or nous avons parfois frôlé un certain « jeunisme » : si le Forum devait continuer à évoluer dans cette direction, alors on pourrait craindre que le fossé entre la société civile et les institutions ne se creuse à nouveau... Pour dire les choses autrement, le Forum s’est terminé sur le mode d’une université d’été, évoquant des sujets extérieurs à la langue elle-même, ce qui en soi est une excellente chose, mais selon moi n’était pas l’objet prioritaire.

Vous représentiez le ministère français de la culture, quel regard portez-vous sur la présence française, en général, lors du Forum ?

Avec prudence et nuance, je dirais que la présence française ne représentait pas le poids réel de la France dans la francophonie... avec un f ou un F. Cela en dépit de la présence à l’ouverture du maire de Paris, Bertrand Delanoë ou du Président de l’Institut Français, Xavier Darcos. Le plus souvent, nous avons assisté à un dialogue entre le Québec et l’Afrique, avec d’ailleurs une regrettable sous représentation du Proche-Orient et du Maghreb, explicable par les restrictions de visa. Pourtant la France représente le 1/4 des locuteurs de français et la Tunisie, le Maroc ou le Liban sont plus que représentatifs de l’espace francophone. Attention à ne pas donner une image décalée de la francophonie... Mais, je dois reconnaître que les Français se sentent si peu francophones que parfois ils peuvent donner l’impression de s’exclure eux-mêmes du mouvement...Il est normal que les Francophones nous rendent la monnaie de notre pièce ! Le symbole de cette ambiguïté est la très grande discrétion des Alliances françaises pendant toute la durée du Forum. Les Alliances françaises sont indispensables à l’apprentissage du Français dans le monde et ne sont pas des structures purement françaises puisque ce sont des associations de droit local. Qui plus est, rien n’empêcherait des enseignants québécois, belges ou africains de postuler et de rejoindre un réseau présent sur les cinq continents. Il faudrait, à l’avenir, remédier à ce type de méfiances injustifiées.

Un mot sur les notions de multilinguisme et de diversité linguistique ?

Je préfère parler ici de diversité linguistique... Cela dit la langue française est tout à fait légitime pour porter le combat de la diversité linguistique et culturelle. Elle est la plus forte des langues dominées par la langue « globale » et peut, à ce titre, porter un message de pluralité... Faut-il rappeler que la langue française est la seule langue, avec l’anglais, à être présente sur les cinq continents ?

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