Minorité francophone en Flandre : L’APFF mise sur l’EPU de 2016
En remettant son bilan à mi-parcours, dans le cadre de son Examen Périodique Universel (EPU), sans aborder la question des minorités, la Belgique a cherché une nouvelle fois à gagner du temps. Par la même occasion, elle a trompé l’ONU et les quelque 300.000 francophones qui vivent en Flandre.
- Edgar Fonck toujours en première ligne pour faire reconnaître les droits des minorités dont ceux des Francophones de Flandre.
- Ph : Aimablement prêtée par E. Fonck
Engagement non tenu
Il faut se rappeler que lors de l’adoption de son EPU, en septembre 2011, la Belgique, par la voix de son représentant à Genève, avait dit : « Lors de la signature de la convention-cadre pour la protection des minorités, la Belgique a formulé une réserve quant au concept de minorité nationale. Dans l’intervalle, un groupe de travail s’est réuni. Jusqu’à présent, il n’y a pas d’accord en Belgique sur ce concept ». Et d’ajouter, en guise de conclusion : « Nous reviendrons vers vous, au Conseil des droits de l’homme, dans deux ans, pour vous faire part du bilan à mi-parcours et vous indiquer nos progrès ».
Par ailleurs, l’accord de Gouvernement de décembre 2011 précise en son point 2.7, intitulé « lutte contre les discriminations » : « En ce qui concerne le suivi de la recommandation sur la ratification de la Convention-cadre sur la protection des minorités nationales formulée dans le cadre de l’Examen Périodique Universel, le Groupe de travail de la Conférence Interministérielle de Politique Etrangère continuera à étudier si un accord peut être trouvé sur une définition du concept de “minorité” ».
Dès lors, la Belgique se devait, à l’occasion du dépôt de son bilan à mi-parcours, de clarifier sa position quant aux recommandations 4 et 11 de l’ONU concernant les minorités.
- L’ONU, outil de cette reconnaissance !
Manque de transparence
De plus, le communiqué de presse des Affaires étrangères (1), annonçant le dépôt du bilan à mi-parcours, jette de la poudre aux yeux, lorsqu’il s’agit de collaboration avec la société civile. Force est de constater qu’il n’a pas été tenu compte des remarques de l’APFF (2) émises lors de la consultation de la société civile du 31 mai dernier.
Pour rappel, l’APFF avait notamment dénoncé le fait que la Belgique avait décidé seule de n’aborder, dans son bilan, que les recommandations acceptées, mettant au frigo les deux recommandations concernant les minorités. Cette décision aurait dû être prise en accord avec la société civile. Alors là, on aurait pu parler de concertation étroite et de transparence, comme la Belgique s’y était engagée dans la méthodologie de son rapport national de 2011. L’APFF avait aussi expliqué que si elle était présente à la réunion, ce n’était pas parce qu’elle avait été invitée spontanément. Elle avait dû passer par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU, avant que les portes ne s’ouvrent.
Que dire, enfin, du nombre si peu élevé de représentants de la société civile à la fameuse réunion (trois en comptant l’APFF), les invitations et les documents de travail ayant été envoyés à la dernière minute ? Nous n’avions pas hésité de dénoncer ce « simulacre de démocratie » à l’époque.
De tout cela, aucune trace (3) dans le bilan à mi-parcours ! Nos remarques concernaient pourtant deux recommandations acceptées, elles, par la Belgique. Notre pays s’est donc engagé à les mettre en œuvre d’ici son prochain EPU en 2016. On est loin du compte !
Institut des droits de l’homme
Tout ceci plaide évidemment en faveur de la mise sur pied d’un Institut des droits de l’homme. Dans les colonnes du Soir du 14 août 2013, le député Georges Dallemagne (cdH), cosignataire de la proposition de loi portant sur la création d’un Institut des droits de l’homme, répond à la question de Michelle Lamensch : « En Belgique, le droit des minorités serait-il tabou ? » A Georges Dallemagne d’expliquer : « C’est vrai. C’est un sujet tellement sensible… Les Flamands se cabrent immédiatement. Je pense qu’un institut indépendant pourra enfin aborder cette question des minorités de manière plus paisible. (…) Il est insensé que la Belgique soit un des très rares pays de l’Union européenne à ne pas avoir ratifié cette convention-cadre ».
L’EPU de 2016 comme objectif
La Belgique, poussée dans le dos par les nationalistes flamands, ne pourra pas éternellement éluder la question des minorités à l’ONU. Déjà en 2011, une dizaine de pays, dont quatre grandes puissances – Etats-Unis, Chine, Inde et Russie –, se sont inquiétés de la situation des minorités dans notre pays.
Le prochain EPU de la Belgique aura lieu début 2016. Lorsqu’on sait que notre pays doit remettre son rapport pour la fin du mois d’octobre 2015 et qu’il lui faut au moins un an pour le préparer, cela veut dire que les discussions sur le sujet débuteront au lendemain des élections de mai 2014.
Afin d’éclairer les électeurs, l’APFF ne manquera pas d’interroger les présidents de parti sur leurs intentions en matière de protection des minorités.