Introduction
Le Ghana, un des pays les plus stables de la sous-région ouest-africaine (Boafo-Arthur, 2008 ; Jacquemot, 2008 ; Kwadzo, 2016), mais dont le taux d’inflation figure parmi les plus instables, est le champ de manifestation de la dichotomie entre la stabilité politique et l’instabilité économique. Au Ghana, l’économie est au centre des préoccupations citoyennes, car elle affecte la vie de tous les jours d’une façon ou d’une autre. Sans doute, c’est une des raisons pour lesquelles tout discours en faveur du redressement économique émanant d’un aspirant à la magistrature suprême du pays est porteur d’espoir et fait l’objet d’une attention particulière de la part des citoyens. Ce sont les mesures économiques spectaculaires proposées par Nana Akufo-Addo lors de l’élection présidentielle de décembre 2016, qui ont convaincu les Ghanéennes et Ghanéens majeurs de toute origine à voter pour lui. Le 7 janvier 2017, l’histoire retiendra de l’investiture du 5e président élu de la 4e République pour un mandat de quatre ans, un fait particulier. En effet, cette investiture marque une rupture avec les cérémonies précédentes d’investiture des anciens présidents élus qui se prénommaient tous « John ». A la suite de cette cérémonie riche en couleurs, les citoyens ghanéens attendent dans l’impétuosité la réalisation des promesses électorales à caractère économique pour lesquelles ils ont élu Nana Akufo-Addo.
- Le président Nana Akufo-Addo - Ph : Wikimedia commons
POLITIQUE
Le gouvernement du président Akufo-Addo conscient des risques qu’entrainerait un embrasement politique dans les pays limitrophes du Ghana, déploie des efforts pour préserver la stabilité politique du pays et de la sous-région. Dans cette perspective, le Ghana est activement engagé dans la recherche d’une solution pacifique à la crise politique qui secoue depuis plusieurs mois son voisin de l’Est, le Togo. Ainsi, la diplomatie ghanéenne a organisé des pourparlers entre les différents protagonistes de la crise politique togolaise. L’objectif du Ghana est de renforcer sa stabilité dans la sous-région qui n’est pas à l’abri des risques de conflits politico-sociaux, en jouant un rôle de réconciliateur dans la crise politique togolaise. Compte tenu de la proximité géographique du Ghana avec le Togo, cette crise a des répercussions directes ou indirectes sur la stabilité du premier nommé. Une des conséquences est d’ordre humanitaire. En fait, la crise togolaise entraine l’afflux migratoire des centaines voire des milliers de Togolais vers le Ghana. Devant cette situation migratoire, on se demande si le Ghana est prêt à faire face à cet exode au moment où il cherche à reprendre en mains sa destinée économique. En plus, la stabilité sous régionale ne pouvant pas être réalisée sans que le Ghana noue des relations cordiales avec ses voisins dont le Togo en particulier, le Ghana reste confronté à un dilemme : celui de concilier les points de vue des différents acteurs de la crise togolaise (notamment celui de l’actuel gouvernement au pouvoir au Togo dirigé par le président Faure Gnassingbe et celui de la coalition des partis togolais d’opposition). En face de ce dilemme, le Ghana devrait prendre en compte aussi bien sa stabilité politique que celle de la sous-région ouest-africaine dans son rôle de réconciliateur.
- Toutes les ressources économiques ne sont pas visibles ! Ph : Flickr - Frans Neve
ÉCONOMIE
Sur le plan économique, il convient de retenir que les promesses électorales faites par l’actuel président Nana Akufo-Addo n’ont pas tardé à se réaliser. Quelques-unes des promesses touchant la vie du citoyen ordinaire ont été prises en compte dans le budget Asempa 2017 du gouvernement du président Akufo-Addo. Parmi ces mesures visant à donner un souffle économique aux citoyens figurent l’abolition de17, 5 % de la taxe à la valeur ajoutée (TVA) sur les billets de vols nationaux, l’abolition de 17,5 % de la TVA sur les services financiers, l’abolition de 17.5 % de la TVA sur certains médicaments importés qui ne sont pas fabriqués au Ghana, l’abolition de 5 % de la TVA appliquée aux ventes de propriétés, la réduction de 17.5 % à 15 % du taux de la taxe sur le pétrole. Également, force est de constater qu’en l’espace de 7 mois au pouvoir, le Ghana assiste à la réduction de l’inflation de 15.4 % en décembre 2016 à 11.9 % en juillet 2017. En plus, le gouvernement prévoit un déficit fiscal de 9.3 % en 2016 à 6.3 % à la fin de l’année 2017. Aussi, faut-il relever le travail colossal entrepris par l’agence du revenu du Ghana visant à faciliter et à rentabiliser la perception des taxes. Dans cette optique, une plateforme appelée « opentaxghana » est créée et mise à la disposition des particuliers et des entreprises pour faire face aux défis encourus en matière de perception des taxes. Un des objectifs de la mise en service de cette plateforme est de favoriser l’éducation de la population afin que les citoyens et les entreprises paient volontairement leurs taxes. La perception des taxes étant un des grands défis de l’économie ghanéenne, il est important qu’une gestion fiable de la perception des taxes soit mise en place pour contribuer à la mobilisation des ressources afin de planifier le développement durable et efficace du pays. Par ailleurs, ces mesures devraient concerner les travailleurs des secteurs formel et informel.
En réalité, ce sont les travailleurs du secteur informel qui, malheureusement, échappent aux rouages du service de la perception des taxes. Dans la mesure où ces travailleurs du secteur informel ne disposent pas forcément des adresses civiques permettant de les localiser ou de retracer systématiquement leurs activités économiques parce qu’ils ont des entreprises ambulantes, il est difficile de contrôler efficacement leurs activités économiques. Bien que la plateforme « opentaxghana » permette aux citoyens et aux entreprises de déclarer volontairement leurs revenus, il relève de la responsabilité des citoyens et des entreprises de l’utiliser. Sur ce point, les coupures d’électricité étant possibles, il est important de trouver des solutions innovantes en matière d’énergie pour faciliter l’utilisation efficace de la plateforme. Devant ces enjeux, il convient de trouver des solutions fiables à la perception des taxes surtout auprès des travailleurs du secteur informel qui forment une grande partie de la population active. La mise en place du projet GhanapostGPS semble être porteuse d’espoir pour pallier ce défi.
- Ph : Flickr - Frans Neve
SOCIÉTÉ
Sur le plan social, le lancement du projet GhanapostGPS ne répond pas uniquement à une volonté d’urbanisation du pays, mais aussi à une vision de redressement économique. Pour le président Akufo-Addo qui a lancé le 18 octobre 2017 le projet National Digital Property Addressing System « GhanapostGPS », ce projet vise à « accélérer notre vision de la formalisation de l’économie ghanéenne ». Selon le président, « la nature informelle de l’économie ghanéenne constitue une entrave au développement économique du pays ». Puisque le Ghana ne disposait pas auparavant d’un système fiable de géolocalisation de propriétés et des entreprises, le service de revenu éprouvait des difficultés à retracer les personnes et les entreprises de façon efficace pour percevoir les taxes et les impôts. Dans un pays où les outils de géolocalisation étaient jusqu’alors « un grand arbre », « une grande maison bleue », « le kiosque d’un vendeur », etc., et qui restent flous pour des personnes qui ne sont pas habituées aux réalités locales, c’est difficile d’attirer des investissements étrangers pour promouvoir le développement économique du pays. Une telle situation limitait l’accès des entreprises aux prêts bancaires et ne facilitait pas au service des revenus la perception des impôts en vue d’une planification à long terme des ressources du pays. Ceci entraine des pertes de revenus qui pourraient contribuer au développement du pays. C’est pour remédier à ces défis que ce projet est porteur d’avenir aussi bien sur le plan social que sur le plan économique. Toutefois, c’est une chose de localiser des citoyens et des entreprises, c’est une autre que les citoyens et entreprises aient les conditions requises pour travailler et fructifier leurs capitaux. Une des conditions nécessaires étant l’électricité, l’accès ininterrompu à l’électricité facturée à des prix abordables constitue une des doléances de la population ghanéenne. Concernant l’électricité, les Ghanéens sont à la recherche d’un service compétitif et attendent avec impatience la réduction des frais des factures d’électricité comme l’avait promis Nana Akufo-Addo pendant sa campagne électorale.