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Le « rêve francophone » de Michel Robitaille

Le « rêve francophone » de Michel Robitaille

Délégué général du Québec à Paris

... je fais un rêve francophone dans lequel le rayonnement de la langue française est indissociable de l’ouverture à l’autre ainsi qu’à d’autres langues, convaincu que l’identité francophone est le résultat d’une pluralité voulue et valorisée, dans le monde de l’Internet comme dans celui de l’espace politique international...

16 juin 2012
Michel Robitaille - Délégué général du Québec à Paris  - © DG Québec à Paris
Michel Robitaille - Délégué général du Québec à Paris
© DG Québec à Paris

La Francophonie est un rêve venu d’Afrique. Un rêve qui s’est fait Histoire grâce à la volonté d’anciennes colonies indépendantes qui militaient, dès le début des années soixante, pour la création d’un « Commonwealth à la française », selon la formule du Sénégalais Léopold Sédar Senghor.

En créant à Niamey, en 1970, l’Agence de coopération culturelle et technique (ACTT), la Francophonie institutionnelle affichait d’emblée son ambition multilatérale. Le rêve d’une Francophonie politique était déjà en germe dans son traité originel. En l’espace de trente ans, le nombre de ses membres doublera. Les vagues successives d’élargissement qui accompagneront l’histoire de la Francophonie, notamment avec l’arrivée des pays d’Europe centrale et orientale, affranchis de la tutelle soviétique après l’implosion de l’URSS, transformeront en profondeur le visage de l’institution francophone. Une nouvelle Europe en construction y adhérait en emportant avec elle un multilinguisme de fait. En entrant dans le nouveau millénaire, la Francophonie devait conjuguer, plus que jamais par le passé, unité et diversité, culture et politique, défense de l’universalisme et promotion de sa spécificité.

Le désir de français y est-il moindre aujourd’hui qu’au moment de sa création à Niamey ou qu’à l’ouverture au mois de février 1986 du premier Sommet francophone de Versailles ? En réalité, la perspective a changé et, forcément, notre perception des choses. En devenant « langue en partage » plutôt que « langue commune », le français s’ouvrait à l’idée de devenir la « langue-monde » d’une organisation internationale qui entendait être un acteur à part entière de la scène politique. En s’ouvrant à d’autres mondes ou bien, si l’on préfère, un monde neuf, la Francophonie entrait dans une nouvelle ère, celle de la communication mondialisée et du métissage.

Un rapport différencié à la langue française unit aujourd’hui les pays membres de la Francophonie. Dans la nouvelle frontière du cyberespace, le français est source d’expression d’une modernité en pleine effervescence : slam, hip-hop, cultures urbaines et en émergence, littérature plurielle, autant de nouvelles formes de prise de parole qui attestent de la cohabitation culturelle en cours dans le monde francophone. Aujourd’hui, quand j’observe cette diversité en marche, je fais un rêve francophone dans lequel le rayonnement de la langue française est indissociable de l’ouverture à l’autre ainsi qu’à d’autres langues, convaincu que l’identité francophone est le résultat d’une pluralité voulue et valorisée, dans le monde de l’Internet comme dans celui de l’espace politique international. Cette francophonie globale et interculturelle rejoint, près de cinquante plus tard, le rêve des Pères fondateurs, car elle donne la preuve que l’utopie des débuts n’a jamais été, au fond, que la formidable anticipation du siècle actuel.

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