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MOLDAVIE - Retour sur l’année 2017

MOLDAVIE - Retour sur l’année 2017

22 janvier 2018 - par Maria Neagu 
Eugeniu Gorean a illustré le « Grand angle Moldavie » de la revue l’Année Francophone Internationale.  - © Aquarelle de Eugeniu Gorean
Eugeniu Gorean a illustré le « Grand angle Moldavie » de la revue l’Année Francophone Internationale.
© Aquarelle de Eugeniu Gorean

POLITIQUE et SOCIÉTÉ

2017 fut largement marquée, sur le plan politique, par la question du vote mixte. À ce sujet, un projet de loi fut présenté par le Parti démocrate (PD) et approuvé en juillet dernier par le Parlement. Ainsi, aux prochaines élections législatives de 2018, les citoyens moldaves éliront, sur les 101 députés de l’Assemblée parlementaire, 51 par vote uninominal et 50 sur les listes des partis ayant obtenu la majorité des votes. Corolaire à cette loi, une charte de 51 circonscriptions uninominales, dont 46 créées sur le territoire contrôlé par les autorités moldaves et 5 à l’est du Dniestr et à l’étranger. Les habitants de la Transnistrie désigneront donc 2 députés, tandis que la diaspora établie en Russie, en Europe et en Amérique du Nord délèguera pour sa part 3 représentants.


Vestiges d’élections - Ph : Arnaud Galy - Agora Francophone

Or, le vote mixte est loin de faire l’unanimité au sein de la société moldave, de même qu’il est largement amendé par les partenaires européens de la Moldavie. L’opposition, par une voix commune des partis Libéral, Libéral-démocrate et Communiste, dénonce un mécanisme mis au service du Parti démocrate (PD) qui souhaite pérenniser son pouvoir, tandis que la plateforme extraparlementaire « PAS » fait remarquer le manque de transparence vis-à-vis l’organisation du scrutin mixte (nombre de circonscriptions, représentativité, parité, etc.), et une iniquité crasse qu’entretient ce système envers la diaspora établie en Occident, connue pour son opposition à l’oligarque Vladimir Plahotniuc, à la tête du PD. À leur tour, les partenaires européens ont exprimé de vives inquiétudes quant à l’influence que pourraient exercer les milieux des affaires sur les députés élus par vote uninominal. Le non-respect des recommandations de la Commission de Venise risque d’ailleurs d’entrainer la cessation d’une assistance macro-financière européenne de 100 millions d’euros.

Le président moldave Igor Dodon - Ph : communication gouvernement MD

Alors que le soutien financier européen demeure un levier important pour le développement de la Moldavie, ses relations avec les partenaires européens se sont complexifiées en 2016-2017. L’orientation externe du pays est devenue l’épicentre de la rivalité entre le Parti démocrate et le Parti socialiste. Le premier, tient un discours pro-européen qui n’est pas dépourvu d’incohérence, ignorant les recommandations de l’UE sur le vote mixte et d’autres mises en garde sur l’état de la démocratie et l’État de droit, tandis que les socialistes adoptent pleinement le vecteur russo-eurasien afin de gagner l’électorat pro-russe et d’obtenir le soutien politique de Vladimir Poutine et de son parti « Russie unie » en vue des élections de 2018. Ainsi, le socialiste russophile Igor Dodon devint-il président du pays en novembre 2016.


Chisinau - Ph : Arnaud Galy - Agora Francophone

ÉCONOMIE

Des querelles politiques et forces contraires qui tiennent en otage le pays, tributaire d’une stagnation pérennisée, de son potentiel humain faiblement exploité et d’un coefficient de compétitivité parmi les plus faibles au monde. La Moldavie occupe la 89e place sur 137 pays dans le Global Competitiveness Index (GCI) de 2017-2018, qui s’appuie sur plusieurs critères de compétitivité, dont le développement des affaires, l’ergonomie de la sphère des services, le bien-être des populations par le prisme de l’accès au système de santé et d’éducation. Ainsi, à titre d’exemple, les principaux obstacles au développement des affaires en Moldavie sont, selon GCI, la bureaucratie gouvernementale inefficace, la main-d’œuvre non qualifiée, l’accès aux crédits, l’infrastructure inadéquate et, non en dernier lieu, la corruption laquelle s’est intensifiée au cours des dernières années. Par ailleurs, la filiale moldave de Transparency International (TI) souligne que les autorités ont échoué dans leur tâche de redresser le système national d’anticorruption. La perception publique du contrôle de la corruption a baissé de 25 positions dans le classement de TI de 2016, et ce malgré une augmentation de 35 % des cas de corruption investigués par le Centre national anticorruption (CNA). D’autres indicateurs ont également empiré, faisant diminuer l’attractivité de la Moldavie comparativement à ses voisins de l’Europe centrale et orientale : médias libres (-8 positions), transparence des politiques gouvernementales (-25 positions) et degré de détournement des fonds publics (-4positions). En outre, en 2016, les pertes financières résultant de la gestion défaillante par le gouvernement du secteur public ont augmenté d’environ 20 %, dépassant le montant de 20 milliards MDL. En outre, les indicateurs de comparaison révèlent une diminution en ce qui concerne la confiance dans les politiciens et le niveau de favoritisme dans les décisions gouvernementales. Ainsi, la bonne gouvernance, la qualité des institutions démocratiques et l’efficacité des politiques de lutte contre la corruption sont des domaines dans lesquels la République de Moldavie ne parvient pas à atteindre la moyenne des pays européens.

De quoi faire fuir les investisseurs étrangers, malgré une croissance économique d’environ 3,5 % qui se maintient à ce niveau depuis quelques années déjà. Sur le plan économique, la Moldavie a enregistré un excédent budgétaire de 1,2 milliard MDL en 2017 dû notamment à l’augmentation de la TVA pour les produits d’importation. Celles-ci, ainsi que les exportations connaissent une progression nette depuis quelques années, avec un déplacement du point d’équilibre vers l’Union européenne, les États-Unis et le Canada, qui accueillent 64 % des produits moldaves, tandis que les pays de la Communauté des États Indépendants (CEI) en reçoivent 21 %. Cette même tendance se dessine en ce qui concerne les transferts d’argent. En 2016, ils se chiffrent à 1 milliard 79 millions USD, dont 34 % proviennent de Russie et des pays de la CEI, et près de 60 %, des pays occidentaux.

Néanmoins, ces progrès économiques ne parviennent pas à redresser les indicateurs du bienêtre social. La Moldavie est toujours en proie au phénomène de migration excessive de sa main-d’œuvre qualifiée, qui se traduit par des drames sociaux comme la dépopulation de villages entiers, l’abandon des enfants par leurs parents partis travailler à l’étranger, la prolifération massive de la criminalité.

Pouvoir central et autonomies administratives
La communication entre Chisinau et l’unité territoriale-administrative Gagauz-Yeri s’est intensifiée au cours de la dernière année, menant notamment à une révision du cadre juridique actuel en vue de doter les autorités locales de plus de pouvoir dans la gestion administrative de l’autonomie gagaouze. On note aussi un renforcement des actions dans le dossier transnistrien, même si les derniers développements n’ont pas encore abouti au règlement du conflit. Alors que se prépare une nouvelle ronde de négociations dans le format 5+2, sur le terrain, certaines avancées sont à noter. Récemment, fut reconstruit et ouvert à la circulation le Pont de Gura Bîcului, explosé lors de la guerre de 1992. Également, les gouvernements moldave et ukrainien viennent de signer une entente visant la mise en place d’un point de contrôle conjoint à Cuciurgan-Pervomaisk, sur le segment transnistrien de la frontière moldo-ukrainienne.

Soutenu par l’UE, ce point commun permet une meilleure transparence des flux commerciaux et de personnes entrant et sortant de Transnistrie. Toutefois, l’administration de Tiraspol et les autorités russes s’opposent à cette mesure, la comparant à un blocus économique et à des pressions externes. Afin d’éviter l’aggravation de la situation économique dans la région transnistrienne et de maintenir la politique du statu quo dans la région, le gouvernement de Chisinau a décidé d’acheter de l’électricité de la région séparatiste, annulant ainsi la décision antérieure de contracter l’électricité au fournisseur ukrainien pour 2017-2018. Parallèlement, les tentatives infructueuses du président Igor Dodon de discuter du règlement du conflit transnistrien avec les autorités russes ont provoqué de nouvelles ruptures dans le dialogue de Chisinau avec l’administration de Tiraspol.


http://www.agora-francophone.org/ma...

Chisinau, de « Ville de pierre » à « Ville de lumière »

Entretien avec Alain Guilhot, Architecte lumière : http://alainguilhotlumiere.fr


Alain Guilhot, vous êtes le maitre d’œuvre d’un projet d’illumination de plusieurs sites architecturaux à Chisinau. Parlez-nous de l’Architecture lumière et du projet que vous développez dans la capitale moldave.

Alain Guilhot - Ph : communication A. Guilhot

En près de 40 ans, j’ai eu le bonheur, et l’honneur, de mettre en lumière 3000 sites en France et dans le monde (58 pays). Trois mille enfants Lumière, tous différents, que j’aime tous, et qui proposent tous une écriture nocturne au service du patrimoine, de l’histoire et du pays, une écriture lumière respectueuse du site, de la ville, de sa culture, et de son culte. En 1989, j’ai été missionné pour concevoir et réaliser le Plan Lumière et la Fête des Lumières de Lyon. Cette fête des Lumières, chaque 8 décembre, reçoit maintenant presque 4 millions de visiteurs en 4 jours et 4 nuits. Cette expertise, cette passion m’ont permis, depuis cette date, d’être appelé en tant qu’Architecte lumière, Directeur artistique, afin de réaliser une ville en lumière, une fête des Lumières partout dans le monde (cf mon livre « Light is Life » - version ibook enrichi et actualisé sur iTunes : https://itunes.apple.com/fr/book/light-is-life/id1048440774?mt=13.
C’est pourquoi, ayant été appelé à Chisinau, la capitale de la Moldavie, par Ion Stefanita, directeur de l’Agence d’inspection et de restauration des monuments historiques en Moldavie, j’ai souhaité élaborer et proposer le principe d’un important projet lumière à réaliser sur plusieurs années : Chisinau, Capitale Lumière. Il s’agit ici d’une Architecture lumière au service des belles architectures de la Moldavie et en priorité celles de Chisinau qui recèle 810 bâtiments classés. La lumière au service de l’Architecture, de son histoire est une écriture fine, élégante, totalement discrète dans la journée [projecteurs souvent complètement invisibles de jour] grâce à l’emploi de LEDs [diodes électroluminescentes] : miniaturisation, très faible consommation, très longue durée de vie, avec la possibilité grâce à la trichromie de proposer des partitions de lumière dans toutes les palettes possibles [toutes les températures de couleurs, tous les blancs, toutes les couleurs]. Les partitions deviennent ainsi de véritables symphonies de lumières, graduables et rythmées par la musique, afin de créer un merveilleux tableau lumière. Avec Ion Stefanita, les réflexions que nous avons menées permettent de proposer 5 sites importants et marquants à Chisinau : les Portes de Chisinau, l’Église Saint Pantelimon, le Musée d’Ethnographie et d’Histoire naturelle, l’Hôtel de Ville [Mairie] et le Palais Présidentiel.

Chisinau, qui a déjà acquis le nom de « Ville de pierre », se prête-t-elle bien à l’Architecture lumière ?

De jour, Chisinau est souvent appelée « Ville de Pierre », de belles pierres ! De nuit, je souhaite proposer le nom de « Ville de lumière » ! Nous allons faire installer de très belles lumières ! Lumineuse métaphore qui va conduire, année après année, Chisinau et la Moldavie, à évoluer et à faire évoluer les Moldaves en contribuant à redonner un sentiment de légitime fierté, d’appartenance à un beau pays. La lumière « réveille et révèle », alchimie subtile, afin d’ouvrir « les champs des possibles » pour aujourd’hui et pour demain : un beau chemin en Lumière...

Un architecte est d’abord un visionnaire. Comment imaginez-vous un renouveau architectural de la capitale moldave ? Que vous inspire cette ville ? Quels sont ses atouts et les défis qu’elle pose aux architectes ?

La lumière au service d’une ville qui a un beau passé [grâce à son patrimoine et son histoire] permet d’écrire une véritable page de renouveau architectural. La lumière apporte de la sécurité [dormez, dormez braves gens, nous veillons sur vous !], mais aussi de la liberté, de la magie qui permette de redécouvrir sa ville, de l’aimer, de la protéger, de la faire connaître... Chisinau, pour l’architecte lumière que je suis, est un nouveau défi, un enjeu très fort, avec un liant et un lien social majeur au service de cette grande capitale qui va s’épanouir en lumière. Un défi et une réussite qui ne peuvent s’envisager que grâce aux organismes et personnalités de Chisinau fédérées autour de ce projet : la Mairie, le ministère de la Culture, Ion Stefanita, Emmanuel Skoulios, Président de la Chambre de Commerce franco-moldave, les architectes et les partenaires économiques concernés. Les atouts sont multiples, et de ce fait les soucis [particulièrement économiques] pourront être étudiés et pris en charge par les partenaires publics, mais aussi, et surtout, par des partenaires privés. Signer ainsi, ou cosigner, le tableau de Chisinau, capitale lumière, constituera un phare médiatique mondial en Moldavie, et dans tous les pays qui ont déjà pris le lumineux chemin vers l’excellence.

Maria Neagu
CÉLAT,
Université Laval
maria.neagu@me.com

En 2017, Maria Neagu a coordonné le "Grand angle Moldavie" de la revue l’Année Francophone Internationale.


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