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ZIGZAG en TUNISIE ! Zigzagueries personnelles

ZIGZAG en TUNISIE ! Zigzagueries personnelles

Petites histoires et grandes rencontres !

"... Quand j’étais plus jeune, je pratiquais la photo. Dans les années 70, quelqu’un m’avait apporté d’URSS un agrandisseur. J’aimais le noir et blanc, quand la photo trempait dans le révélateur... tout était écrit en russe je ne comprenais rien, mais j’ai appris !"

12 novembre 2013 - par Arnaud Galy 
 - © Arnaud Galy
© Arnaud Galy

18 octobre

Dehors, on capte mieux !
Ph : A Galy

Tunis, au Café des banques.

La longue avenue Mohamed V est droite comme un i, plantée de palmiers, de bureaux et de sièges de banques. La Banque africaine de développement est à deux pas. Une partie de l’avenir de la Tunisie se joue derrière ses murs. Une partie seulement... Dans tout le quartier, les rares pelouses sont entretenues et, miracle de l’argent oblige, les ordures sont ramassées. Les habitants de la Médina ou des banlieues lointaines apprécieront, ils n’ont qu’à venir habiter là ! Les agents de sécurité qui tiennent les murs n’ont pas l’air de plaisanter. Des blindés garés à l’ombre d’un immeuble plombent un brin l’ambiance. Reconnaissons que les nouvelles diffusées ce matin sur les radios ne portent guère à la plaisanterie. Des affrontements entre forces de l’ordre et terroristes barbus ont causé la mort de 3 militaires dans la journée d’hier et plusieurs groupes armés sont recherchés près des frontières... Tout cela est loin de Tunis, mais on peut comprendre l’inquiétude des banquiers de l’avenue. Pour se donner du courage ou pour mieux méditer sur les cours de la bourse de Dubaï, les costards-cravates du coin se retrouvent au Café des banques. Le dernier téléphone coréen greffé à l’oreille, chacun y va de son analyse en sirotant le café de Georges Clooney. Un gâteau, type quatre quarts chocolaté fait recette. Agréable à l’œil, il est un brin étouffe-chrétien. Gageons que cette formule familière bien française n’augure rien.


17 octobre

Aujourd’hui, la Lumière...
Ph : A Galy

Le Bourguibisme n’est pas mort !

En chaire et en os, il existe. L’homme a 55 ans, travaille à l’entretien d’un lieu culturel à Carthage. Face à la Méditerranée, il se confie sans détour, parle vite, souriant et malicieux : j’ai trois enfants, deux garçons et une petite princesse. L’émotion est palpable et, sans aucun doute possible, sincère. J’aime le travail bien fait, mais j’aime aussi le plaisir, le plaisir de travailler ! J’aime le geste, le beau geste. Je cuisine, vous savez, on peut découper une tomate avec un couteau très aiguisé et en faire une fleur et avec un jaune d’œuf je décore l’assiette. C’est magnifique, jouer avec les couleurs, les saveurs... Je suis aussi ébéniste et menuisier, je restaure des meubles, vous savez ? Quand j’étais plus jeune, je pratiquais la photo. Dans les années 70, quelqu’un m’avait apporté d’URSS un agrandisseur. J’aimais le noir et blanc, quand la photo trempait dans le révélateur... tout était écrit en russe je ne comprenais rien, mais j’ai appris ! Je prenais des photos avec un Yashica puis un Praktica, j’ai même eu un Canon ! Vous savez, je crois qu’il faut être heureux dans la vie. J’aime ma femme. Quand je lui fais un petit baisé, mon fils qui est croyant me reproche de faire cela devant lui ! Que croit-il que je l’ai eu par correspondance ? Enfin, il est libre, moi je ne suis pas pratiquant. Ici, je suis avec des grands savants, il y a des livres partout, je suis heureux...

Carthage, dans une gargote éclectique !

C’est un McDo local tenu par des jeunes. Un garçon qui a l’air sérieux et une fille serrée dans un jean, une longue chevelure noire recouvrant ses épaules. Le français du premier est très hésitant, celui de la demoiselle, parfait. Une radio crachote des prêches depuis plusieurs minutes quand soudain, changement de programme, une télévision s’allume et des clips dégoulinants d’histoires d’amour et de musiques à consommer envahissent la pièce. Au mur, une affiche montre une rue américaine : grosses bagnoles et enseignes lumineuses publicitaires géantes le prouvent ! Parmi les enseignes, celle du centre de la photo vante un établissement « topless girls » ! Bienvenue en Tunisie méli-mélo !


15 octobre

Retardataires à l’ouvrage !
Ph : A Galy

Tunis, Médina où es-tu ?

Se balader dans la Médina de Tunis un jour d’Aïd est une idée bien saugrenue ! Elle, qu’on imagine si vivante, tourbillonnante et populeuse est vide. Oui, vide. Toutes les boutiques sont fermées, rideaux de fer baissés ou barres métalliques soigneusement cadenassées. Le pavé des souks résonne comme des coquilles de noix vides. Juste quelques cris d’enfants joueurs et des chats qui miaulent, miaulent, miaulent... Même l’Aïd se fait discret : une famille de retardataires poursuit la découpe du mouton, un balayeur termine le nettoyage du pas de sa maison et fait disparaître les dernières traces du sacrifice. Des « hommes du feu » actionnent des lance-flamme histoire de faire griller, à la vitesse de l’éclair, des morceaux de moutons restés en rade sur un coin de trottoir. Des vélomotoristes incapables de mettre leur pot d’échappement en sourdine trimballent de grosses poches odorantes débordantes de peaux sanguinolentes. Pourtant, les rues sont vides, silencieuses et un brin inquiétantes. Des tombereaux d’immondices assassinent les angles des ruelles, mais là, l’Aïd n’y est pour rien. Seules les carences de l’État et des services dits publics sont responsables. Qu’il doit être pesant de vivre ici, sans parler de l’espérance de vie moyenne d’un mouton ! À moins que la vie reprenant son cours, dans les prochaines heures, suffise à redonner un sens à la Médina. Un jour d’Aïd, elle en est dépourvue...


Tunis, la Médina de l’Aïd !
Ph : A Galy

14 octobre

Demain, c’est l’Aïd !

Acte I  : Ce matin, entre le chant des tourterelles, le miaulement des matous et le vent dans les cyprès, une autre note fait une apparition remarquée. Le bêlement des moutons. Demain, l’Aïd mettra la Tunisie en joie et au ralenti. Dans les jardinets, les bestioles en voie d’être sacrifiées, s’interrogent : j’étais si bien dans mes pâturages, que fais-je ici ?

Acte II : Le chauffeur de taxi est vraiment sympa, agréablement francophone et de bonne compagnie. Avec gentillesse il prévient que demain, pour cause d’Aïd, peu de taxis seront en service. Et lui, comment fête-t-il l’Aïd ? Dans sa famille, à Tunis. L’œil vissé au rétroviseur : mais je refuse d’assister ou de participer au sacrifice ! Je ne supporte pas... Il fait un signe explicite avec la main, couic ! Je ne peux pas, depuis que je suis tout petit, je ne peux pas. Un étranger à la famille vient pour cela...

Épilogue : Une attitude qui n’empêchera pas ce brave homme de dépenser 600 ou 800 dinars pour l’achat du mouton et quelques autres poignées de dinars laborieusement gagnées pour que la fête soit dignement réussie. À la louche, 3 mois de salaire d’un Tunisien x ou y... Aux dernières nouvelles, ce soir les intermédiaires qui font leur beurre sur la vente des moutons n’ont pas écoulé leurs troupeaux et une organisation de consommateurs ose annoncer un chiffre : 60% des Tunisiens n’ont pas acheté de mouton. Invérifiable, certes, mais...

Le chauffeur de taxi sensible à la souffrance animale a cédé à la tradition, cette année encore !


Carthage... une horde chasse l’autre !

Il fut un temps où les Vandales déferlèrent sur la cité. Temps révolu, direz-vous ? Que nenni ! D’autres vandales ont pris la suite et ceux-là sont bien agaçants, euphémisme de rigueur. Ils sont en tongs, portent des lunettes de soleil style starlettes cannoises, portent le short comme uniforme et grimpent, dégringolent, s’esclaffent. Les tas de cailloux n’ont que 2000 ans et il faut être tatillon pour penser qu’ils méritent un brin de respect. Mais le vandale de 2013, au fort accent russe la plupart du temps, n’est pas tatillon ! Il ne vient pas voir Carthage, il vient se voir à Carthage. Tout y passe, les poses lascives des demoiselles – au demeurant très agréables à regarder – étalées sur les colonnes de marbre ; les pauses viriles de leurs compagnons fantasmant sur les muscles des soldats romains... téléphones, tablettes, mini Samsung, gros Nikon rien n’est trop beau pour Facebooker instantanément vers la planète entière. Qu’importe si une pierre dégringole ! Au détour d’une colonne, un couple est assis, regarde, respire, ressent. Spassiba !


Une journée ordinaire à Carthage
Ph : A Galy

13 octobre

Sidi Bou Saïd, la carte postale promise !

Pour bien profiter de ce petit paradis, il convient de passer par la case bizutage ! Les 100 premiers mètres d’ascension, le touriste est pris en charge : le dresseur de faucon ; le vendeur de bijoux vieux de 300 ans au moins (les bijoux, pas le vendeur !) ; le potier ou le mosaïste... il suffit d’être diplomate, souriant et un brin ferme et le bizutage se déroule sans heurts. Ensuite, que dire : du bleu, du blanc, des chats et des parfums envoûtants. Sans oublier de succomber au thé à la menthe et aux pignons de pin du Café des nattes. Entourés de quelques Tunisiens, de Coréens et d’Anglais qui semblent heureux d’être là. Si, si... tous les touristes ne sont pas des vandales. Chic !


Sidi Bou Saïd, toute en douceur.
Ph : A Galy

La Marsa

Une rencontre fortuite qui en dit long sur les questions sans réponses que se posent de nombreux jeunes Tunisiens. Ici, jeune Tunisienne. À mi-chemin entre la vingtaine et la trentaine ; formée, hyper formée même ; en course pour passer un doctorat ; bien dans ses baskets... et pourtant, pour la première fois depuis qu’elle a entamé son parcours du combattant universitaire elle s’interroge : rester en Tunisie ou non ? Elle sent bien que l’état de son pays ne réserve rien d’encourageant à court terme pourtant elle ne parvient pas à s’engager. Les manifestations dans la rue ne sont pas envisageables, aux grands regrets de sa mère qui, elle, n’en manque pas une et bouscule sa fille pour qu’elle en fasse de même... sans résultat ! La génération Bourguiba serait-elle plus prompte à se mobiliser que la génération Ben Ali ? La jeune femme avoue les yeux dans les yeux qu’elle ne comprend rien à ce qui secoue son pays : incompétence des uns, radicalisme religieux des autres, affairismes des suivants... rumeurs, désinformations, violences occasionnelles, chaos organisé ou désorganisé ! Elle ne sait plus que penser. Et puis manifester dans la rue pour prendre un coup de matraque ou passer la nuit dans une cellule avec des gardiens pas automatiquement soucieux des droits de l’homme... ou de la femme, très peu pour elle. Alors, oui, pour la première fois elle pense que, peut-être, un jour viendra...


La Marsa, le café Saf Saf, tunisien dans l’âme !
Ph : A Galy

12 octobre

La Marsa, une ambiance parmi d’autres...

« le passé revisité », voilà comment le café Saf Saf se voit. C’est écrit en français et en arabe sur les murs du jardin. Le drapeau tunisien flotte, les drapeaux tunisiens devrait-on dire tant il y en a ! Suspendus aux arbres, accrochés aux balustrades ou floqué sur le maillot d’un client. Parfois une musique arabo-andalouse laisse place à une musique boumboumesque très américaine, ce doit être cela « le passé revisité  »... Des chats et des canards, clopin-clopant, déambulent ensemble parmi les clients qui n’y prêtent guère attention. Pas de pâtisseries pour accompagner le thé brûlant, le diabète attendra.
Sur la terrasse « du haut », des vieux, cachés sous des lunettes, jouent aux cartes, silencieusement. Peut-être ont-ils toujours joué aux cartes ici, ensemble, depuis que le Saf Saf existe et que les canards tiennent compagnie aux chats. D’autres hommes, seuls et tout aussi silencieux, fument dans de petits salons et un vieux français fait le paon devant une jeune femme aux longs cheveux noirs. Elle regarde les canards passer...


La Marsa, trio !
Ph : A Galy

11 octobre

Le show et froid commence dès le vol. Toulouse – Tunis. Simple comme bonjour, non ? Oui, mais voilà, les heures de retard s’accumulent au départ de la ville d’Airbus et les distributeurs de chocolats à l’eau chaude et de sandwiches humides n’y suffisent plus. Le temps est un tantinet long. Long pour tout le monde, y compris pour une poignée de jeunes femmes au fort accent du sud (de la France !), remontées comme des coucous suisses, elles s’imbibent de boissons fortes, histoire de faire passer les heures d’attente. En un mot comme en cent, quand les demoiselles sont entrées dans l’Airbus enfin arrivé elles étaient en équilibre instable, elles riaient très fort et étaient prêtes presque à tout, avec tout le monde ! C’était pathétique ! Reconnaissons que les stewards de Tunisair ont le mérite d’avoir su gérer la situation, scabreuse, avec décontraction et rigueur. Chapeau bas, messieurs.


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