Consigne : Associer la couleur bleue à la réécriture d’une microfiction de Régis Jauffret, Saint Valentin (Microfictions, éd. Gallimard, 2007, Folio, p. 807-08) dont voici le début :
— Nous sommes restés à la maison.
Il y avait du soleil dehors, et on voyait les gens passer sous nos fenêtres en voitures décapotables, la tête tournée vers le ciel, comme s’ils préféraient être victimes d’un accident plutôt que de voir leur bronzage pâlir. Nous n’avons pas fait l’amour. Depuis plusieurs années nous avons l’habitude de ne pas faire l’amour. Nous dormons dans le même lit comme deux copains sous une tente…
Toutes les histoires d’amour sont pareilles. Vient d’abord la passion avant que les sentiments ne passent du cœur à la mémoire. La passion n’est plus. Mais nous avons pris l’habitude de voir le même visage. L’habitude finit par être lassitude. Nous voudrions aller voir ailleurs, faire souffrir l’autre qui nous ennuie, juste histoire de pimenter ce désastreux quotidien. Mais nous restons là, comme un vieux couple attendant patiemment la mort. Se séparer est impossible. L’inconnu nous fait trop peur. Alors nous restons sur nos acquis. Un jour, mon mari vient me voir.
– La voisine donne tous ses livres. Elle m’en a donné pour toi.
Parmi ces livres, je découvre un ouvrage de Zola, Thérèse Raquin. Cette femme qui meurt d’ennui face à un mari qu’elle ne peut plus supporter. J’observe la couverture du livre. Je l’effleure. Prémonition ? Hasard ? Destin ? Tout se bouscule dans ma tête. Et puis un jour, la goutte d’eau fait déborder le vase. Alors que nous nous promenions, j’ai bousculé mon mari. Il tombe dans l’eau. Cette eau est si bleue qu’elle m’apaise. Ne sachant pas nager, il se noie. Je retourne paisiblement chez moi. Je sens une main me secouer et j’entends une voix qui me demande :
– Camille, tu dors ?