La consigne : Mon déjeuner avec le.la Président.e
J’ai rencontré la Présidente ou Madame la Présidente. Je ne sais plus comment on dit. Elle était là, sur le pavé. Un tout petit trottoir, pas plus large qu’un corps allongé. Sur le bitume se tenait cette petite femme. Il était convenu que nous dînions ensemble le soir. Le soir était venu. Son corps était menu et ne dépassait pas l’ombre qu’elle projetait sur le muret, tout près, juste derrière elle. Pas un mot, rien. Je ne sais pas comment j’en suis arrivé là. Impossible de me rappeler la manière dont je me suis mise dans cette situation mais j’étais figée. Incapable de rien. Je ne sais pas ce qui fait que les choses sont ce qu’elles sont. Elle, moi puis moi puis elle. Je n’ai d’abord pas compris. Insensé qu’est de se retrouver en face de Madame la Présidente, là comme ça, sans rien dire ni savoir quoi faire. Elle n’avait pas l’air surprise et encore moins ennuyée. C’est cette absence de gêne qui m’a gênée. Rien. Rien ne se dégageait de son regard ou de son attitude. Elle se contentait d’exister sur ce tout petit trottoir. Ce minuscule trottoir qui portait ses deux jambes. Celles qui portaient toute la France. Mes yeux se sont posés sur les siens puis comme ça, nous nous sommes vues. Des années. Des années que nous ne nous étions pas aperçues. Et nos retrouvailles si soudaines. C’est elle qui m’a contactée. Vous êtes là, tranquillement assis sur votre canapé puis votre téléphone sonne et c’est elle qui vous appelle comme ça. Après des années de silence, cette sonnerie qui transperce l’ennui. D’abord au téléphone puis en face de moi. Elle était là. Ma mère s’occupait de la France depuis des années et s’était finalement souvenue qu’elle avait une fille : moi. Voilà pourquoi parfois, certains soirs comme ceux-là se produisent.