L’homme est d’un calme olympien, parle avec douceur. Derrière une coiffure singulière et des vêtements inimitables, il promène un sourire généreux. Gustave Akakpo est de ceux qui n’ont pas goûté, mais alors pas du tout, l’embrouillamini diplomatique sorti d’un chapeau maléfique 2 jours avant le lancement du festival. Ni une ni deux, épaulé de plumes de son entourage, le dramaturge togolais jeta sur le papier une ébauche de pétition adressée à Emmanuel Macron. Mieux vaut s’adresser au Bon Dieu qu’à ses saints... L’ébauche s’est affinée puis a été envoyée.
Pétitions ou dramaturgie, Gustave Akakpo ne craint pas le syndrome de la page blanche. Tant d’idées fourmillent qu’il lui faudrait davantage éliminer les surplus que de presser les neurones pour trouver une lumière supplémentaire. Lorsque lui vint l’envie d’écrire sur les mythes, il commença par faire un pas de côté. Toujours faire un pas de côté. Depuis Paris où il vit, il posa un pied à Kourou, Guyane française. Un autre à Ziguinchor, Sénégal. Il aurait bien mis un pied à Winnipeg, Manitoba – Canada, mais là, il tomba sur un os nommé absence de visa. Tiens, tiens, il n’y a pas qu’en Europe que la frousse effarouche. Pourquoi ces trois lieux, enclavés ?
Ces trois territoires connurent des temps anciens maudits et sanglants scarifiés dans la peau des jeunes générations. Territoires de moult tribus, peuplades et ethnies ; territoires empoignés par le Blanc conquérant et colonisateur ; territoires vidés de leurs enfants expédiés dans des écoles ou pensionnats censés purifier leurs âmes des cultures ancestrales étiquetées sataniques...
De la découverte de ces antipodes, le dramaturge a tiré On marronne ? L’histoire de jeunes évangélistes, de diverses origines, préparant « une croisade », à savoir une vaste opération d’évangélisation. Alors que leur religion commune constitue un socle unificateur, ils se rendent compte que le socle est fêlé. On ne se sépare pas sur ordre de ce qui nous constitue et de ce qui façonne les générations qui nous ont précédées. Sénégalais, Guyanais ou autochtones canadiens n’éliminent pas d’un coup de baguette magique les rituels, les contes et leur cosmogonie. La religion des colons blancs ne reste qu’un vernis qui ne demande qu’à s’écailler. Et si, ces mythes facilitaient, aussi, la lecture de l’actualité ou de faits scientifiques ? Gustave Akakpo le croit. Suivez-le, son chemin est sinueux, mais il sait où il va... Heureusement, se perdre entre Ziguinchor, Winnipeg et Kourou éloignerait de Limoges.